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Ma visite au Salon du livre de l’Outaouais (le SLO)

Je n’aime pas vraiment visiter les Salons du livre. En cela, je ne suis pas très spéciale. Quand je demande à mes distingués collègues (tous de sympathiques intellos profs du collégial) s’ils visiteront celui de l’Outaouais, ceux-ci font d’habitude la moue en me disant « Ouin, mon fils ou ma fille veut y aller, il a toujours rêvé de rencontrer (insérer le nom d’un auteur jeunesse à succès), mais ça ne me tente pas vraiment d’aller là. » Moi? J’y vais, à peu près un an sur deux, en essayant de me convaincre que ça me fera du bien, que j’y découvrirai un auteur de talent et que ce sera un peu plus édifiant de passer un après-midi là que de regarder en rafale des épisodes de Making a Murderer – la suite sur Netflix. 

Je ne sais pas pourquoi je n’aime pas tant que ça cet événement qui serait, en principe, supposé me combler de bonheur, moi, groopie littéraire de première classe. Il y a des livres, il y a des auteurs, il y a des conférences, des tables rondes, des témoignages, un bar à mots. Il y a plein de choses qui habituellement me font vibrer et m’enivrent. Alors, pourquoi est-ce que je me dis, en février, lorsque les pubs du Salon apparaissent, que cette année, je visiterai celui-ci, c’est certain, et que je finis par ne plus du tout avoir le goût d’y aller quand mars frappe à ma porte? 

J’ai eu une partie de ma réponse en entrant au Salon. La personne qui s’y trouvait était l’homme fort Hugo Girard. Comprenez-moi bien, je n’ai rien contre les hommes forts en général et contre Hugo Girard en particulier. C’est plutôt ce qu’il représente qui m’attriste. C’est comme si, au paradis du livre, là où devraient régner les pas trop belles filles rejets et les garçons frêles un peu précieux, les gros bras gagnaient encore comme ils gagnent partout. Et, il n’y était pas le seul, le sympathique colosse, à attirer les foules devant lui : il y avait Yannick Dubeau, euh…Patrice Godin, Sœur Angèle, Biz, le Pharmachien et James Hyndman qui avaient devant eux des files de fans finis qui prenaient des selfies avec leur vedette préférée. Il y avait aussi la madame à l’origine du phénomène Cours toutounne qui était bien entourée et plusieurs très belles filles, auteures de chick litt qui doivent faire un malheur sur Instagram, avec devant elles des hordes d’admiratrices. On dirait qu’il n’y avait que Denise Bombardier qui était relativement seule (mais il ne faut pas s’en surprendre, avec toutes les bêtises qu’elle dit ces temps-ci sur les francos hors-Québec, Denise, c’est facile de comprendre pourquoi on la boude. En tous cas, moi je la boude). Non, ce n’est pas vrai, il n’y avait pas que Madame Bombardier qui était toute seule, il y avait aussi plein de jeunes auteur(e)s pas trop connus que personne ne visitait. Un peu comme au secondaire quand les populaires passent leur heure du diner entourés d’amis et que les intellos pas trop sociables se cachent dans un coin de la bibliothèque tout en souhaitant qu’on remarque leur existence. 

N’allez pas croire que je n’ai pas apprécié ma présence au SLO. J’ai adoré assister à la table ronde animée par Catherine Perrin et qui réunissait 4 des 5 auteurs en lice pour le Prix littéraire des collégiens : une belle occasion d’entendre et de voir les personnes qui ont écrit les romans dont je discute avec mes étudiants cette session. J’étais bien et ma tête ne tournait plus (c’est souvent ce qui m’arrive dans des salons du livre, il y a comme trop de monde, trop de sons et je me sens étourdie). Je les aurais écoutés parler pendant des heures, ces jeunes auteurs intelligents. En même temps, c’était surréaliste d’entendre Kevin Lambert, l'auteur queer de Querelle de Roberval, parler de la formation des rôles sexuels chez les jeunes hommes gays ou de son plagiat du maitre plagiaire Lautréamont en plein milieu de cette foire où des mères criaient, où des enfants pleuraient et où plusieurs personnes n’occupaient une chaise que pour se reposer un peu, entre deux séances de signature de vedettes, à regarder leur cellulaire et en n’étant pas tout à fait là. 

Après la table ronde, j’ai fait le tour du Salon et j’ai pris des photos de vedettes, pour afficher sur mon profil Facebook et montrer aux gens que je faisais quelque chose d’intéressant de mon samedi après-midi. C’est en me disant que je devrais bien aller lire chez moi plutôt que de tourner en rond que j’ai vu l’auteure de mon livre préféré de 2018 (Ouvrir son cœur), Alexie Morin. Ce roman parle de l’enfance et de l’adolescence d’une jeune fille introvertie et hypersensible comme je l’étais. J’ai pris mon courage à deux mains et je suis allée discuter avec Alexie. J’aurais aimé lui faire ressentir à quel point son livre m’avait marquée, mais il y avait trop de bruit et trop de monde pour réellement échanger et pour que je lui dise tout le bien que la lecture de son livre m’avait fait. Je lui ai dit que j’admirais la grammaire parfaite de son bouquin et que ça paraissait qu’elle était éditrice. Elle a semblé réellement contente d’entendre ça. J’étais réellement contente de lui dire ça. J’ai aussi jasé avec Lula Carballo, auteure de Créatures du hasard, un livre dont nous avions discuté la veille dans le cadre du Prix littéraire des collégiens. J’ai trouvé celle-ci si sympathique que je me suis dit que ça se pouvait, être une auteure de talent et (sembler) être équilibrée. 

Je suis partie avec un tout petit mal de tête, mais en même temps une grande envie de lire et un goût de recommencer à écrire. Peut-être que cette foire était là pour me dire que j’ai besoin, plus que jamais, de la grande paix intérieure que m’apportent de bonnes lectures. Irai-je l’an prochain? J’en ai aucune idée, mais je sais qu’aujourd’hui, et tous les autres jours de l’année, la lecture sera ce qui me transportera loin du bruit de cette société où ce sont toujours les hommes forts et les trop belles filles qui gagnent, même au Salon du livre…

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