En 2001, j'ai eu la chance de partir en mission pour le nord d'Haïti, avec une joyeuse bande d'âmes charitables. Idéalistes, nous nous en allions animer des camps de jour dans la ville portant le nom bucolique de Port-de-Paix.
Je ne garde que de bons souvenirs de mon passage dans ce pays à la fois si meurtri et chaleureux. Je crois que je suis encore plus touchée de ce qui arrive en Haïti, parce que j'ai visité le pays.
Je ne sais pas trop pourquoi, mais les enfants m'avait surnommée Mammie Caroline. Le soir, après le camp, je me promenais dans les rues et j'entendais des enfants crier mon nom. Mammie Caroline, Mammie Caroline, qu'ils criaient. Le matin aussi, ils venaient près de la maison des Frères et m'appelaient. Les enfants m'invitaient à jouer avec eux et ils ne savaient pas à quel point Mammie Caroline n'était pas matinale... Il était 7h. Des fois, je continuais à dormir, d'autres fois, j'acceptais leur invitation. Ces si beaux matins, je me sortais de mon endormissement en chantant et en dansant avec de si beaux enfants.
Mes trois semaines passées là-bas m'ont charmée. En fait, je ne comprends pas trop pourquoi je n'y suis pas encore retournée.
En ce moment, je voudrais y être. Je voudrais donner de mon temps. Je sais que ce n'est pas ma place. Les gens ont besoin de médecins, de soldats. De plus, j'ai quand même un emploi à plein temps que je ne peux lâcher...
Pour faire quelque chose de bien, j'ai décidé de faire un don à la Croix-Rouge. Je ne crois pas que ce ne soit que pour me donner bonne conscience. Je suis sincèrement affligée. Je crois que ce n'est pas juste que le malheur s'acharne encore une fois sur des gens qui n'ont aucunement mérité ce qui leur arrive.
Je crois que je suis aussi triste pour le peuple haïtien que déçue de l'attitude de certains de mes compatriotes.
En me promenant sur certains blogues, je lis des atrocités. Ces conneries scorent très haut sur l'échelle de la bêtise humaine.
Des gens assis comme moi dans le confort de leur demeure canadienne disent à leurs lecteurs de ne pas donner, que l'argent qui devait servir à aider le peuple lors de la tragédie des Gonaïves, il y a quelques années, ne s'est jamais rendu à destination. J'ai aussi lu que charité bien ordonnée commençait par soi-même et qu'il fallait d'abord aider les gens d'ici. Je sais que certains organismes sont mal gérés. Je sais que les dons ne vont pas toujours aux nécessiteux. Ce que je sais aussi, c'est qu'Haïti a en ce moment plus besoin de notre aide immédiate et monétaire que de notre cynisme et de notre désabusement mal placés. Ces gens ont le droit de penser ce qu'ils veulent, bien sûr. Mais exprimer ces doutes et ces rancoeurs ainsi, même pas 24 heures après qu'une capitale ait été presque entièrement dévastée, voilà qui est révoltant, selon moi.
Nous sommes chanceux. Nous avons un toit. Nous n'avons pas peur qu'il s'effondre ce soir. Nous ne méritons pas plus cette chance que les Haïtiens ne méritent leur malchance.
En regardant hier les images apocalyptiques présentées par Radio-Can et en lisant ce matin le touchant récit de l'excellente Chantal Guy, je me suis sentie à la fois remplie d'un grand malaise et d'une folle espérance. Malaise de ne rien pouvoir faire. Espérance que la communauté mondiale se retrousse les manches. Pour que les enfants haïtiens continuent longtemps à chanter. Un jour, j'espére de nouveau entendre leur rire joyeux. C'est pour cela que j'ai fait un don à la Croix-Rouge, n'en déplaise à tous les cyniques de ma province et d'ailleurs.
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