J'aime visiter des expositions ou des musées portant sur un artiste en particulier. De cette façon, je sens que je rencontre une personne et que j'apprends à la connaître. J'ai ainsi découvert Degas (ma première passion artistique, à 16 ans), Dix, Chagall, Matisse, Munch, Van Gogh, Rembrandt et plusieurs autres. Certains artistes me fascinent, comme Courbet et Caravaggio, d'autres me frustrent, comme Picasso (j'ai lu la bio de sa xième femme, Françoise Gilot et depuis, je ne suis pas capable de le sentir). J'aime aller à la rencontre de ces génies qui réinventent notre façon de voir le monde.
Durant mes pérégrinations dans les musées, aucun artiste n'a su me toucher autant qu'Antoni Gaudi. Je l'ai rencontré un peu par hasard. Notre guide EF, en 2006, Flora, nous parlait avec des étoiles dans les yeux du Parc Güell. Je me demandais ce qui l'allumait autant. Cela n'a pas pris de temps pour que je comprenne les raisons de son amour pour l'architecte catalan. Avec mon collègue Jean-François et les étudiants de mon groupe, je suis entrée dans cet endroit et j'ai été subjuguée par sa magie enchanteresse. Les éclats de céramique recyclée, les tourelles sorties de contes de fée, le gigantesque banc qui, en plus d'être magnifique, est d'une ergonomie parfaite, m'ont séduite. Le lendemain, j'ai visité la Casa Batllo, au thème aquatique, puis ce soir-là, je suis retournée avec Jean-François et quelques étudiants au Parc Guëll, pour y boire un verre de vin. Je me souviendrai toujours de cette soirée magique. Gaudi m'a conquise.
En 2007, je voulais faire découvrir mon artiste préféré à Mathieu. Nous avons donc fait la tournée des "must" gaudiens: le Parc, bien sûr, mais aussi la Casa Mia, la Casa Batllo et la fameuse Sagrada Familia. Je me souviens très bien de mon premier passage en ce lieu. Nous avons pris le temps de contempler deux de ses façades. Nous sommes entrés dans l'église et avons visité ce qui était, alors, un chantier de construction. Je me disais que cet endroit serait extraordinaire, un jour.
Nous sommes retournés à la Sagrada Familia hier. J'étais déçue en voyant que la façade de la Passion était recouverte. On ne voyait que partiellement les stations du chemin de croix que nous avions tant admirées, en 2007. Il y avait beaucoup de monde et le soleil brillait trop fort. Je trouvais que les gens essayaient plus de photographier un monument que de s'imprégner d'une oeuvre géniale. Pas facile de vivre une expérience spirituelle dans ces conditions. Je suis entrée dans l'église. Ce qui n'était qu'un chantier en 2007 est maintenant un temple dédié à la nature, à la lumière, à la couleur et à la foi. J'avais des frissons et, assise à l'écart, j'ai versé une larme. Que c'était beau!
L'Église catholique n'est pas mon institution préférée, depuis déjà plusieurs années. Je suis tannée de sa fermeture face à des questions sociales de la plus grande importance, comme l'avortement ou la contraception, excédée par le peu de place qu'elle accorde aux femmes, dégoûtée par le traitement qu'elle réserve aux membres de la communauté LGBT et enragée lorsque j'apprends que certains prêtres abuseurs sont protégés par celle-ci. Quand je suis entrée dans la Sagrada Familia, j'ai oublié l'Église et ses travers et je me suis sentie bien dans une église, pour la première fois depuis longtemps.
La lumière qui traverse les vitraux m'a fait penser à la rédemption. Il finit toujours par y avoir de la clarté, à la fin de toutes les noirceurs, car la lumière trouve une façon d'entrer. Les couleurs des nouveaux vitraux m'ont rendue joyeuse. Je ne pouvais arrêter de photographier ce bleu si pur, ce vert si vivant et ce jaune si étincelant (on aurait presque dit un drapeau arc-en-ciel). Quand on lève les yeux, on voit des colonnes en tronc d'arbre et un plafond en feuillage et on se sent protégé, comme on le serait sous un grand chêne, lorsqu'il pleut, dans le bois. Ça devrait être la fonction des églises, non? Nous offrir lumière, couleur et réconfort?
J'ai un jour appris que le mot religion veut dire "ce qui nous relie". Lorsque je marchais dans cette église dédiée à la Sainte Famille, j'ai senti que l'humanité était une famille. J'ai vu des adolescents recueillis, des homosexuels qui se donnaient la main, des madames permanentées émues, des jeunes cool qui faisaient des selfies devant le crucifix. Je n'étais pas au Moyen-Âge, mais dans le monde d'aujourd'hui. Et c'est exactement ce que souhaitait Gaudi. Je pense qu'il serait fier de son oeuvre.
Au milieu de ma visite audioguidée, j'ai écouté un homme réciter de manière très sentie le Notre Père. J'ai répété des centaines de fois cette prière, mais je ne l'ai pas écoutée pour de vrai depuis longtemps. J'ai été très touchée par la phrase "Délivre-nous du mal". Ma vie n'est pas un enfer, loin de là, mais j'aime savoir que je peux compter sur certaines choses pour me délivrer de ce qui me fait mal. Parler, pleurer, prendre un café, écouter de la musique, marcher à l'air frais, regarder des oeuvres d'art, respirer profondément sont des choses qui délivrent. Parfois, cela prend plus. J'ai senti hier quelque chose de plus haut que moi. J'ai aussi vu que tous ceux qui m'entouraient semblaient, pour un instant, délivrés de leur mal en regardant toute cette beauté qui s'étalait devant eux. Nous étions en paix.
Ce que j'aime de la Sagrada Familia, c'est qu'elle est un work in progress. Il y a encore des vitraux à découper, de la sculpture à faire, des bancs à installer. Elle date de plus d'un siècle, mais sa construction n'est pas finie. J'aime penser que ma vie est ainsi. Je n'ai pas fini de me construire, d'évoluer, de faire entrer la lumière de différentes façons. Peut-être qu'il faut que je laisse une petite chance à l'Église, qu'elle est aussi un work in progress. En fait, j'aimerais qu'elle soit aussi grande et ouverte que l'oeuvre de Gaudi. Je m'y sentirais chez moi et j'aurais le goût d'y rester.
Je ne sais pas qui est Dieu et où il se trouve, mais je sais que j'ai vécu hier un moment très fort dans un lieu d'une grande beauté. Je vous souhaite de vivre cette expérience. Pas besoin d'être à Barcelone pour cela, il faut juste ouvrir les yeux et avoir le coeur prêt. La beauté est partout, en nous et autour de nous. Merci Antoni Gaudi de me l'avoir rappelé.
Durant mes pérégrinations dans les musées, aucun artiste n'a su me toucher autant qu'Antoni Gaudi. Je l'ai rencontré un peu par hasard. Notre guide EF, en 2006, Flora, nous parlait avec des étoiles dans les yeux du Parc Güell. Je me demandais ce qui l'allumait autant. Cela n'a pas pris de temps pour que je comprenne les raisons de son amour pour l'architecte catalan. Avec mon collègue Jean-François et les étudiants de mon groupe, je suis entrée dans cet endroit et j'ai été subjuguée par sa magie enchanteresse. Les éclats de céramique recyclée, les tourelles sorties de contes de fée, le gigantesque banc qui, en plus d'être magnifique, est d'une ergonomie parfaite, m'ont séduite. Le lendemain, j'ai visité la Casa Batllo, au thème aquatique, puis ce soir-là, je suis retournée avec Jean-François et quelques étudiants au Parc Guëll, pour y boire un verre de vin. Je me souviendrai toujours de cette soirée magique. Gaudi m'a conquise.
En 2007, je voulais faire découvrir mon artiste préféré à Mathieu. Nous avons donc fait la tournée des "must" gaudiens: le Parc, bien sûr, mais aussi la Casa Mia, la Casa Batllo et la fameuse Sagrada Familia. Je me souviens très bien de mon premier passage en ce lieu. Nous avons pris le temps de contempler deux de ses façades. Nous sommes entrés dans l'église et avons visité ce qui était, alors, un chantier de construction. Je me disais que cet endroit serait extraordinaire, un jour.
Nous sommes retournés à la Sagrada Familia hier. J'étais déçue en voyant que la façade de la Passion était recouverte. On ne voyait que partiellement les stations du chemin de croix que nous avions tant admirées, en 2007. Il y avait beaucoup de monde et le soleil brillait trop fort. Je trouvais que les gens essayaient plus de photographier un monument que de s'imprégner d'une oeuvre géniale. Pas facile de vivre une expérience spirituelle dans ces conditions. Je suis entrée dans l'église. Ce qui n'était qu'un chantier en 2007 est maintenant un temple dédié à la nature, à la lumière, à la couleur et à la foi. J'avais des frissons et, assise à l'écart, j'ai versé une larme. Que c'était beau!
L'Église catholique n'est pas mon institution préférée, depuis déjà plusieurs années. Je suis tannée de sa fermeture face à des questions sociales de la plus grande importance, comme l'avortement ou la contraception, excédée par le peu de place qu'elle accorde aux femmes, dégoûtée par le traitement qu'elle réserve aux membres de la communauté LGBT et enragée lorsque j'apprends que certains prêtres abuseurs sont protégés par celle-ci. Quand je suis entrée dans la Sagrada Familia, j'ai oublié l'Église et ses travers et je me suis sentie bien dans une église, pour la première fois depuis longtemps.
La lumière qui traverse les vitraux m'a fait penser à la rédemption. Il finit toujours par y avoir de la clarté, à la fin de toutes les noirceurs, car la lumière trouve une façon d'entrer. Les couleurs des nouveaux vitraux m'ont rendue joyeuse. Je ne pouvais arrêter de photographier ce bleu si pur, ce vert si vivant et ce jaune si étincelant (on aurait presque dit un drapeau arc-en-ciel). Quand on lève les yeux, on voit des colonnes en tronc d'arbre et un plafond en feuillage et on se sent protégé, comme on le serait sous un grand chêne, lorsqu'il pleut, dans le bois. Ça devrait être la fonction des églises, non? Nous offrir lumière, couleur et réconfort?
J'ai un jour appris que le mot religion veut dire "ce qui nous relie". Lorsque je marchais dans cette église dédiée à la Sainte Famille, j'ai senti que l'humanité était une famille. J'ai vu des adolescents recueillis, des homosexuels qui se donnaient la main, des madames permanentées émues, des jeunes cool qui faisaient des selfies devant le crucifix. Je n'étais pas au Moyen-Âge, mais dans le monde d'aujourd'hui. Et c'est exactement ce que souhaitait Gaudi. Je pense qu'il serait fier de son oeuvre.
Au milieu de ma visite audioguidée, j'ai écouté un homme réciter de manière très sentie le Notre Père. J'ai répété des centaines de fois cette prière, mais je ne l'ai pas écoutée pour de vrai depuis longtemps. J'ai été très touchée par la phrase "Délivre-nous du mal". Ma vie n'est pas un enfer, loin de là, mais j'aime savoir que je peux compter sur certaines choses pour me délivrer de ce qui me fait mal. Parler, pleurer, prendre un café, écouter de la musique, marcher à l'air frais, regarder des oeuvres d'art, respirer profondément sont des choses qui délivrent. Parfois, cela prend plus. J'ai senti hier quelque chose de plus haut que moi. J'ai aussi vu que tous ceux qui m'entouraient semblaient, pour un instant, délivrés de leur mal en regardant toute cette beauté qui s'étalait devant eux. Nous étions en paix.
Ce que j'aime de la Sagrada Familia, c'est qu'elle est un work in progress. Il y a encore des vitraux à découper, de la sculpture à faire, des bancs à installer. Elle date de plus d'un siècle, mais sa construction n'est pas finie. J'aime penser que ma vie est ainsi. Je n'ai pas fini de me construire, d'évoluer, de faire entrer la lumière de différentes façons. Peut-être qu'il faut que je laisse une petite chance à l'Église, qu'elle est aussi un work in progress. En fait, j'aimerais qu'elle soit aussi grande et ouverte que l'oeuvre de Gaudi. Je m'y sentirais chez moi et j'aurais le goût d'y rester.
Je ne sais pas qui est Dieu et où il se trouve, mais je sais que j'ai vécu hier un moment très fort dans un lieu d'une grande beauté. Je vous souhaite de vivre cette expérience. Pas besoin d'être à Barcelone pour cela, il faut juste ouvrir les yeux et avoir le coeur prêt. La beauté est partout, en nous et autour de nous. Merci Antoni Gaudi de me l'avoir rappelé.
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