Cette semaine j'ai été, pour la première fois, nostalgique de mon année passée à voyager. Comme je l'ai expliqué à au moins 10 personnes, ce n'est pas tant de voyager avec mon sac à dos qui me manque, mais plutôt cette liberté d'esprit et d'action que permet le voyage de plus d'un mois.
Je songe à ces heures passées à lire de géniaux Stephan Zweig à Montpellier, ces matins entiers à marcher près de la mer puis à écrire le bleu que je venais de voir m'éblouir, en Croatie ou à Barcelone. Je pense à Amsterdam avec Annie, puis avec Nancy, je pense à ces amis rencontrés en Inde ou en Asie du Sud-Est, je pense à Paris, à Vienne, à Budapest, à Cesky Krumlov, à la Norvège avec Kine, à partout avec Mathieu...
Je me dis que j'ai été privilégiée de pouvoir jouir de toute cette liberté. Chanceuse d'avoir pu vivre une année avec comme principale préoccupation de choisir quel musée je visiterai ou quel vin je dégusterai en soirée. J'ai aimé marcher au grand air dans le printemps norvégien, prendre 1000 photos de cerisiers japonais en fleurs, à Pékin, à Paris et à Stockholm. J'ai aimé tant de choses qui me reviennent par bribes éparses.
Cette nostalgie est parfois bienheureuse, mais elle m'empêche aussi de vivre le moment présent, le seul qui ne compte vraiment. Ici, en ce moment, les feuilles rougeoient de beauté et je ne prends pas le temps de les regarder, alors que des tas de touristes font le voyage d'Asie dans le seul objectif de voir cet automne qui est le mien. Parlant de ces feuilles, il me semble que ça fait 10 ans que je n'ai pas vu des arbres enflammés de coloris automnaux. L'an passé, nous étions en Roumanie, à ce temps-ci. La lumière était douce et les matins étaient frais, dans le Maramures surtout, mais on était loin de nos ocres et de nos orange brûlé. Je sais que je suis extrêmement chanceuse de pouvoir assister à ce spectacle, mais je voudrais seulement prendre le temps d'en profiter un peu plus. Je ne voudrais pas, comme je l'ai déjà fait, passer à côté de l'automne, la tête enfouie dans mes devoirs de grammaire, mes corrections et mes préparations de cours. Je m'en vais faire du camping avec mes élèves la fin de semaine prochaine. Souhaitez-nous du beau temps. J'aimerais marcher, seule ou avec des jeunes, et prendre le temps de profiter de l'automne qui passe si vite, trop vite.
Oui, la nostalgie m'a frappée cette semaine, mais je ne dois pas la laisser gagner. Parce qu'à regretter les villages allemands et les montagnes autrichiennes, je passe à côté des richesses qui m'entourent. Je peux choisir d'être libre, choisir de continuer à lire Zweig, continuer à écrire. Personne ne m'en empêche. Moi, parfois. Moins maintenant, je l'espère. Je suis de retour. Feuilles d'automne, ne vous envolez pas tout de suite, le coeur à Hanoï, je n'ai pas encore pris le temps de bien vous regarder et de bien m'impreigner de vos couleurs, si jolies quand elles contrastent avec un ciel bleu de fin d'après-midi.
Commentaires