Je marche dans une rue commerciale de Nijni Novgorod, en plein après-midi. C'est le mois d'août, les gens sont en vacances, on distribue des boissons énergétiques aux passants et un vieux monsieur joue des standards jazz avec une clarinette fluo. Je ne dirais pas que l'ambiance est festive, mais on n'est pas très loin de cela. Une jeune fille marche avec son copain. Comme cela m'arrive souvent, elle échappe son chandail. Je constate qu'elle n'a pas remarqué que son chandail est tombé et je le ramasse pour elle. Je m'approche de son copain pour lui donner le vêtement et celui-ci s'éloigne de moi, semblant me dire "Que veux-tu, vieille folle?". La fille voit son chandail et me le prend des mains sans me sourire ni me remercier. Moi qui pensais faire une bonne action, je me retrouve à me sentir presque mal d'avoir dérangé ces gens qui ne veulent pas nécessairement de ma présence, comme la majorité de la population russe, on dirait.
Je pourrais vous raconter des dizaines de petits moments comme celui-là. Cette dame qui m'engueule car je prends une photo de graffiti près de sa maison, cette guide du musée consacré au dissident Sakharov qui soupire chaque fois qu'elle finit de parler, ces gens sur le bateau de croisière sur la Volga qui me disent bêtement que je ne peux m'asseoir près d'eux. Et la liste pourrait s'allonger à l'infini. Je ne me sens pas la bienvenue, ici. Pourtant, je souris, je tente d'être polie et respectueuse et de ne pas faire de faux pas. J'ai payé cher pour venir ici et mon argent encourage l'économie locale. Pourquoi ai-je l'impression que je ne suis pas à ma place, que je suis comme de la visite qui dérange?
Il me reste une semaine à faire ici. J'ai sûrement quelque chose à tirer de cette rustre Russie. J'ai probablement à apprendre à être moins dépendante des réactions des gens à mon égard. Mon expérience de prof peut me servir à cet égard. Des dizaines de fois, je me suis présentée pour la première fois devant des étudiants qui ne semblaient pas trop vouloir être là et qui ne répondaient pas par des sourires à mes sourires. J'ai persévéré et nous avons appris à nous apprivoiser. Ce n'est pas parce que des étudiants ne réagissent pas ou semblent bêtes qu'ils ne m'aiment pas. De la même façon, ce n'est pas parce que les Russes que j'ai côtoyés semblent ne pas vouloir de ma présence que cela veut dire que je ne suis pas la bienvenue ici. Je dois aller plus loin que leur face bête et leurs remontrances.
Comment faire, en une semaine, alors que je ne parle pas la langue? Profiter des occasions qui se présentent à moi pour capter la lumière de ce peuple et de ce pays, j'imagine. Me souvenir de cette rencontre avec une vieille paysanne tatare aidera, j'en suis certaine. Nous avons, avec notre groupe Intrepid, hier, dîné dans une famille. Après le repas, nous avons visité l'aieule du village. Cette gentille grand-mère nous a donné des pantoufles qu'elle a tricotées et nous a parlé simplement de sa vie. Elle nous a souhaité la santé, le bonheur et l'égalité entre les hommes et les femmes. Elle riait et n'arrêtait pas de nous dire à quel point elle était heureuse que nous la visitions. Elle nous a accueillis dans sa maison et nous a ouvert son coeur. Cette chaleur faisait du bien. C'est aussi elle, la Russie, je vais essayer de m'en souvenir, la prochaine fois que quelqu'un me lance un regard de feu car je ne me suis pas assise à la bonne place ou que j'ai dépassé une quelconque ligne dont je ne connaissais pas l'existence. Les pantoufles roses qu'elle m'a données seront là pour m'aider à m'en souvenir.
C'est un défi que de visiter la Russie pour une courte de période de temps. Je n'aime pas ce pays, jusqu'à maintenant, mais je suis prête à lui laisser une chance. Comme partout ailleurs, c'est certain que des grands-mères gentilles, des paysages sublimes et des oeuvres d'art spectaculaires s'y cachent. Il me faut juste aller plus loin pour les trouver et ne pas m'en faire si l'on ne répond pas à mes sourires. On y répondra ailleurs, un jour. Ou peut-être, qui sait, peut-être même ici, si je ne me décourage pas trop.
Je pourrais vous raconter des dizaines de petits moments comme celui-là. Cette dame qui m'engueule car je prends une photo de graffiti près de sa maison, cette guide du musée consacré au dissident Sakharov qui soupire chaque fois qu'elle finit de parler, ces gens sur le bateau de croisière sur la Volga qui me disent bêtement que je ne peux m'asseoir près d'eux. Et la liste pourrait s'allonger à l'infini. Je ne me sens pas la bienvenue, ici. Pourtant, je souris, je tente d'être polie et respectueuse et de ne pas faire de faux pas. J'ai payé cher pour venir ici et mon argent encourage l'économie locale. Pourquoi ai-je l'impression que je ne suis pas à ma place, que je suis comme de la visite qui dérange?
Il me reste une semaine à faire ici. J'ai sûrement quelque chose à tirer de cette rustre Russie. J'ai probablement à apprendre à être moins dépendante des réactions des gens à mon égard. Mon expérience de prof peut me servir à cet égard. Des dizaines de fois, je me suis présentée pour la première fois devant des étudiants qui ne semblaient pas trop vouloir être là et qui ne répondaient pas par des sourires à mes sourires. J'ai persévéré et nous avons appris à nous apprivoiser. Ce n'est pas parce que des étudiants ne réagissent pas ou semblent bêtes qu'ils ne m'aiment pas. De la même façon, ce n'est pas parce que les Russes que j'ai côtoyés semblent ne pas vouloir de ma présence que cela veut dire que je ne suis pas la bienvenue ici. Je dois aller plus loin que leur face bête et leurs remontrances.
Comment faire, en une semaine, alors que je ne parle pas la langue? Profiter des occasions qui se présentent à moi pour capter la lumière de ce peuple et de ce pays, j'imagine. Me souvenir de cette rencontre avec une vieille paysanne tatare aidera, j'en suis certaine. Nous avons, avec notre groupe Intrepid, hier, dîné dans une famille. Après le repas, nous avons visité l'aieule du village. Cette gentille grand-mère nous a donné des pantoufles qu'elle a tricotées et nous a parlé simplement de sa vie. Elle nous a souhaité la santé, le bonheur et l'égalité entre les hommes et les femmes. Elle riait et n'arrêtait pas de nous dire à quel point elle était heureuse que nous la visitions. Elle nous a accueillis dans sa maison et nous a ouvert son coeur. Cette chaleur faisait du bien. C'est aussi elle, la Russie, je vais essayer de m'en souvenir, la prochaine fois que quelqu'un me lance un regard de feu car je ne me suis pas assise à la bonne place ou que j'ai dépassé une quelconque ligne dont je ne connaissais pas l'existence. Les pantoufles roses qu'elle m'a données seront là pour m'aider à m'en souvenir.
C'est un défi que de visiter la Russie pour une courte de période de temps. Je n'aime pas ce pays, jusqu'à maintenant, mais je suis prête à lui laisser une chance. Comme partout ailleurs, c'est certain que des grands-mères gentilles, des paysages sublimes et des oeuvres d'art spectaculaires s'y cachent. Il me faut juste aller plus loin pour les trouver et ne pas m'en faire si l'on ne répond pas à mes sourires. On y répondra ailleurs, un jour. Ou peut-être, qui sait, peut-être même ici, si je ne me décourage pas trop.
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