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Ralentir



Je voulais faire ma sérieuse et vous trouver une définition du slow travel. Je me disais que ça ferait plus crédible de parler de cette façon de voyager en commençant par citer ce qu'en pensent les spécialistes de la question. Quand je suis venue pour googler le terme, le réseau du Rusty Pelican, auberge où nous demeurons, s'est mis à ralentir. J'ai pris ça comme un message. Je suis à l'Ile Maurice, en plein milieu de l'océan Indien. Je ne peux me dépêcher à trouver ce que ça veut dire que de voyager lentement. Vous googlerez le terme vous-mêmes, donc. Moi, je me contenterai de vous parler de ma vision du voyage au ralenti.

Lors de notre précédent périple, en 2007-2008, nous avons commencé l'année en lion. Allemagne, République tchèque, Pologne, Autriche, Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, tout cela en deux mois et demi. Je me souviens que notre rythme était haletant. Je me souviens aussi que, le 19 octobre 2007, je me suis cassé la cheville en descendant les marches de notre auberge de jeunesse de Plovdiv. À l'hôpital, on m'a dit que j'en avais pour 60 jours à porter un plâtre. Nous avons décidé de voler jusqu'à Nice puis de me payer une convalescence à Montpellier. Cette décision a été l'une des meilleures de notre vie. Je pense souvent à ces moments avec nostalgie. Nous logions dans un super appart du quartier arabe de Montpellier. Nous allions presque chaque jour au cinéma Diagonal, nous lisions dans des cafés, nous assistions à des rencontres avec des écrivains, puis nous buvions du vin du Languedoc. Les gentils proprios de notre appart nous amenaient voir leur coin du pays et nous avons même eu la chance de passer une semaine à Sète, chez notre chère Annie. Nous avons ralenti.

Ce n'est pas cool de se casser la cheville et encore moins cool de se la casser en Bulgarie, mais cette expérience nous a appris à ne pas attendre de nous blesser pour reprendre notre souffle. Cette fois-ci, nous avons planifié des temps d'arrêt. Dans le Queensland, à Airlie Beach et à Cairns, nous n'avons pas fait grand chose, à part marcher près de la mer, regarder la télé, manger des Tim Tam et boire du cabernet sauvigon Penfold. Oui, nous sommes allés voir la Grande Barrière de corail, mais c'est lentement que nous l'avons fait.

Ici, c'est pareil. Nous vivons lennnnteeeeemeeeennnt. Nous sommes arrivés à l'Ile vendredi dernier et j'ai déjà lu trois livres (des briques!). Nous prenons un temps fou à faire l'épicerie (une heure et demie le premier jour) et à cuisiner. Je marche et je prends plus de photos de fleurs que jamais. Il fait chaud et si vous me connaissez un peu vous savez que je n'aime pas la chaleur, mais ce n'est pas bien grave. Je marche à l'ombre et me mets le nez dans mon ventilateur dès que je suis à l'intérieur. Je me plais même à observer les jolis oiseaux de l'Ile et à apprécier leur chant. D'ici jeudi prochain, nous irons peut-être faire un tour à Pamplemousse et à Bel Ombre... ou pas. C'est pas grave, nous n'avons rien réservé. Nous ne nous engageons à rien.  Le plus beau moment de ma journée? Après dîner, je nous prépare du bon café de l'Ile et nous le buvons tranquillement, en lisant, en écrivant et en écoutant Songza. Du pur bonheur, je vous le dis. Et pas cher, en plus!

Vous seriez en droit de me dire que je pourrais faire ce que je fais ici chez moi. Pourquoi aller au bout du monde, si c'est pour faire ce que j'aime faire à la maison? Bonne question. L'Ile Maurice invite au calme et à la lenteur. Les gens ne sont pas pressés, ici. Quand on les croise, ils sourient discrètement en nous disant bonjour. On ne peut être un paquet de nerfs, ça ne marche pas. Il faut renoncer à se dépêcher. Aller en ville prend deux heures en autobus, alors que ça ne prendrait que 40 minutes en voiture... Pas grave, on a plus de temps pour contempler les sublimes paysages, pour sentir le vent nous rafraichir la figure et pour écouter la musique choisie par le contrôleur-DJ! Et, on n'a pas peur de perdre la vie comme en Inde, car les routes sont belles et les chauffeurs sont en général plus respectueux de la vie humaine ici que dans le pays de Gandhi!

Oui, j'avais besoin de cet arrêt. J'ai rangé mon sac à dos dans le fin fond d'un placard et je ne le reprendrai que jeudi prochain. Mes bottes de marche sont aussi bien sages dans leur coin. Mes souliers de toiles et gougounes les remplacent. Chaque jour, je me baigne longuement dans la belle petite piscine du Rusty Pelican. Ça fait du bien.

Je pense que j'aimerais retrouver cette paix lorsque je reviendrai. Je sais que le stress de la vie «normale» reprendra et que je ne peux vivre comme si j'étais sur une ile paradisiaque tous les jours. Cette pression que je me mets à être fine, à être bonne, à tout bien faire reviendra, mais je peux quand même décider de vivre un peu plus à mon rythme. Une "slow life", ça doit exister, non? Il va falloir que je google cela un jour. Pas tout de suite. Là, il y a mon roman pas trop intelligent et mon verre de blanc qui m'attendent.

Pour Noël, je vous souhaite du temps pour vous en abondance. Il n'y a pas de course, il y a juste la vie qui est si belle, lorsqu'on a la chance de la déguster.

Commentaires

lah a dit…
Et là réside peut-être un des plus grands défis de la vie: prendre le temps de vivre, apprendre à marcher au lieu de courir. Merci pour pensées partagées.

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